On a besoin de vieilles choses


Quand on regarde un vieux film, ce qui surprend, c’est que tout y semble beaucoup plus lent. Tout y bouge moins vite.

Et avec nos cerveaux abîmés par les outils du XXIe siècle, on a tendance à s’y ennuyer assez facilement, parce qu’on est habitué à des formats qui bougent beaucoup plus rapidement.

C’est pareil dans nos vies : chaque année, les choses y vont encore plus vite.

Il y a de plus en plus de contenus à consulter, de plus en plus de choses à faire, de plus en plus de choses qu’on devrait avoir fait mais qu’on n’a pas eu le temps de faire, de plus en plus d’opportunités et donc aussi de plus en plus d’occasions ratées. Il y a de plus en plus de tout, de plus en plus vite.

Ça, ce n’est pas nouveau. Ce qui est nouveau, c’est que ça s’accélère maintenant à une vitesse qui peut faire paniquer certains. Ils se demandent : « À quel moment est-ce que je ne serai plus capable de tenir le rythme ? Et qu’est-ce qui va se passer ce jour là ? »

Pendant toute ma carrière, j’ai été un adepte de la rapidité extrême. J’ai créé et lancé une formation en ligne par semaine pendant des années (jusqu’à en créer plus de 400). J’ai publié une leçon vidéo par jour pendant un an pour les membres de ma communauté, Webmarketing Junkie. J’envoie aussi un mail par jour aux inscrits à ma newsletter. Et je ressors à peine d’un sprint de plus de 80 vidéos YouTube quotidiennes publiées.

Mais même en faisant tout ça, j’ai eu souvent l’impression de ne pas en faire assez, pas assez vite. Parce qu’autour de moi, le monde bouge encore plus rapidement, de plus en plus rapidement, comme une machine infernale qui se serait emballée.

C’est la raison pour laquelle je trouve tellement de réconfort dans les choses qui ne bougent pas. Une vieille maison est plus reposante qu’un appartement moderne, parce qu’on sait qu’elle était déjà là avant qu’on soit né, et qu’elle nous survivra. Un vieux roman est plus réconfortant qu’un bouquin qui vient de sortir, parce qu’en le lisant, on ressent un sentiment d’intemporalité qui détend.

Les choses intemporelles sont un peu comme des rochers au milieu d’un torrent : si on se retrouve happé par le courant, on peut s’y accrocher, et retrouver le calme. Parce qu’on sait que le rocher ne bougera pas.

Beaucoup d’entrepreneurs du web ne jurent que par la modernité : ils veulent avoir le tout dernier Mac, le tout dernier iPhone, utiliser les toutes dernières techniques, méthodes et formats de contenu du moment… Et ils font la même chose dans leur vie personnelle : ils courent après tout ce qui est nouveau. Leur rêve, c’est d’habiter dans une maison high-tech, dans le dernier endroit qui fait le buzz, avec un frigo qui a le wifi, un lit qui fait des massages et qu’on peut contrôler via une appli.

Ce qu’ils ne voient pas, c’est que ces choses-là changent tout le temps, et changent de plus en plus vite. Ton frigo wifi sera obsolète dans un an. L’appli qui te sert à contrôler ton lit à 10 k, elle sera déjà vieillotte dans moins de 36 mois. Et l’endroit qui fait le buzz aujourd’hui deviendra démodé dans trois ans.

Du coup, ils n’ont plus rien à quoi s’accrocher. Et ils se demandent pourquoi ils sont devenus tellement anxieux.

Avoir au moins une partie de sa vie qui soit bâtie sur des choses intemporelles, ça détend. Ça permet de regarder toute cette agitation de loin, d’y participer quand on en a besoin mais sans s’y attacher, et en s’en sentant protégé parce qu’on n’est pas dépendant du courant.

Certains trouvent leur rocher dans les vieilles pierres, en habitant une maison ancienne. D’autres dans une pratique régulière de la randonnée, ou du contact avec la nature sous une forme ou une autre. D’autres en renouant avec leurs racines culturelles, ou même religieuses ou rituelles. Et d’autres encore, en lisant tous les jours des vieux livres dont les pages sentent l’Histoire.

C’est leur rocher, sur lequel ils viennent se reposer au milieu du torrent en furie.

Et un rocher, je crois qu’on a tous besoin d’en avoir un, aujourd’hui plus que jamais. Parce qu’assis sur ce rocher, on peut regarder le monde bouger sans que chaque nouveauté ne menace de chambouler nos vies.


📷 La photo du jour :

Deux livres lus récemment, que je recommande :

Pour ceux qui ont vécu en Thaïlande, les romans de John Burdett rappellent plein de souvenirs, et c'est magique.

Et Les grandes familles, c'est le premier livre d'une trilogie de Druon, dans laquelle on partage le quotidien et les intrigues de familles puissantes, à Paris, dans l'entre-deux-guerres.

« Chacun de nous, voyez-vous, porte en soi au départ plusieurs destins possibles, et l'on ne sait jamais si la vie nous a fait suivre le bon. »


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